Le liseron des haies : entre volutes et turbulences

Parmi les herbes folles qui peuvent envahir les parterres et menacer la quiétude du jardinier, il y en a une bien élégante que j’ai toujours peine à arracher : il s’agit du liseron des haies ou grand liseron (Calystegia sepium). Et pourquoi ? Parce que contrairement à ses congénères piquantes et urticantes (orties, ronces, chardons ou gaillet), le liseron appartient à l’espèce rare des mauvaises herbes « sympathiques ». Ses fleurs blanches en trompette, éphémères et gracieuses, ressemblent à celles plus colorées de sa précieuse cousine l’ipomée. Mais ne nous y trompons pas : le liseron est obstinément envahissant et ne trouve pas sa place dans les jardins bien tenus. Son charme appartient au règne des broussailles.
De la famille des convolvulaceae
Le nom de cette famille botanique, convolvulaceae, m’évoque justement cette liane, qui convole en volutes grâce à ses tiges volubiles (le liseron me rend poète 🪶). Ce nom vient du latin “convolvere” qui signifie “s’enrouler sur lui-même”. Et c’est ce qu’il fait. Il s’enroule, et s’enroule, et s’enroule encore.
En anglais, son nom est bindweed : littéralement l’herbe qui s’enroule.
Et c’est grâce à cette technique que le liseron des haies parvient à se hisser très haut : en s’enroulant à tout support, végétal ou autre. Ses tiges grimpantes peuvent atteindre 5 mètres de hauteur 🪜.
Il ne lui reste plus qu’à recouvrir de ses belles feuilles au limbe très développé son support, le privant ainsi de lumière et l’asphyxiant peu à peu.
Le saviez-vous ?
En botanique, les feuilles en forme de pointe de flèche sont dites sagittées.
Les feuilles du liseron des haies sont en forme de fer de flèche, aigues au sommet, mais dont la base, qui est en coeur renversé, présente deux larges oreillettes obtuses
Sur la photo ci-dessous, une haie de thuya presque entièrement recouverte de liseron (et c’est haut le thuya !) :

Une "belle de jour" très très envahissante....
La multiplication du liseron s’opère à deux niveaux :
- Les tiges souterraines (les rhizomes) se ramifient et donnent des rejets souterrains. Même un petit fragment de racine peut donner une nouvelle plante, d’où la nécessité, lorsqu’on désherbe, d’être armé de patience et de s’appliquer pour retirer la racine entière.
- La multiplication de la plante s’effectue également par les graines. Sachant qu’une fleur produit entre 2 et 4 graines et que ces graines restent viables dans le sol jusqu’à 20 ans, je vous laisse faire le calcul de la probabilité de voir cette plante resurgir là où vous pensiez l’avoir éradiquée (vous avez bien lu 😱).
Parlons maintenant de ses fleurs :
La fleur du liseron, comme sa cousine Belle de jour qui appartient elle aussi à la famille des convolvulaceae, ne vit qu’une journée, parfois quelques heures seulement. Cela s’explique par plusieurs raisons liées à son adaptation biologique :
- Stratégie de pollinisation éclair :
- Cette fenêtre coïncide avec l’activité maximale des pollinisateurs (abeilles, bourdons…).
- Une fois la pollinisation effectuée, la fleur n’a plus besoin de rester ouverte : c’est une économie d’énergie.
- Fleur éphémère mais renouvelable
- Même si chaque fleur a une durée de vie courte, la plante produit beaucoup de fleurs tout au long de l’été.
- Cela compense la brièveté de vie de chaque fleur.
- C’est une stratégie typique des plantes à floraison continue : elles fleurissent souvent, mais brièvement.
- Sensibilité aux conditions extérieures : la fleur du liseron est très fine et délicate, donc sensible :
- À la chaleur : elle se fane vite en plein soleil.
- À la pluie : elle se replie ou meurt plus tôt en cas de mauvais temps.
Mais alors, plus de fleurs, éphémères, c’est donc plus de graines ? 😱😱😱
Fun fact : avez- vous entendu parler de la circumnutation ?
La plante, enroulée autour de son support, est loin d’être immobile. Mais saviez-vous qu’elle s’enroule toujours dans le même sens, celui des aiguilles d’une montre ? C’est ce qu’on appelle la circumnutation : le phénomène par lequel une plante subit une rotation au cours de sa croissance, en créant des formes hélicoïdales.
Pour visualiser ce phénomène, rien de tel qu’une démonstration en vidéo !
Un peu de poésie 📖
Pour conclure, j’avais envie de citer Chateaubriand dans son Essai Historique, Politique et Moral sur les Révolutions Anciennes et Modernes :

Articles similaires
En savoir plus sur Le petit jardinaute
Subscribe to get the latest posts sent to your email.